Ni remord ni regret

« C’est moi qui t’ai suicidée
Mon amour
Je n’en valais pas la peine
Tu sais
Sans moi tu as décidé
Un beau jour
Décidé que tu t’en allais »
Sorry Angel », Serge Gainsbourg)

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Nous avons fait ce qu’il ne fallait pas faire, ce que nous n’aurions pas dû faire au nom de la fidélité promise pour moi officiellement, et devant témoin pour lui tacitement…

[Témoignage]

Des regrets ? Négatif.
Je le regrette ?
Je ne le regrettais pas.

J’ai vécu une folle passion à l’aube de mes vingt ans, un amour interdit de vingt ans de plus que moi, qui du jour au lendemain a mis un terme à notre relation. Et depuis j’étais devenue anesthésiée sentimentalement. Je m’entendais bien avec le père de mes enfants, mais sans plus. Celui qui était l’un des amis de mon mari a provoqué en ce jour de décembre, peu avant Noël, une passion qui n’avait de précédent que celle vécue presque trois décennies avant. Alors un soir dans un appartement qu’il retapait après une coupe de champagne et quelques huîtres partagées avec des collègues pour fêter Noël avant l’heure…

J’ai joué.
Je me suis lancée.
Je me suis risquée.
Sans regret.
Sans arrière-pensée.
Mais après ?

Après nous nous sommes revus. Les textos continuaient de plus belle, les cœurs coloraient nos écrans et clignotaient dans nos messages virtuels. Les « Je t’aime » rythmaient nos journées, ensoleillaient nos soirées et nos nuits.

Mais sa femme s’est doutée de quelque chose. Leur couple battait encore plus de l’aile. Elle le convoquait à des dîners. Armée de son smartphone, elle dictait ses reproches. Un matin, elle lui a pris son portable subrepticement devant les enfants, il lui a couru après. Elle lui donnait des ultimatums pour qu’il prenne une décision d’engagement. Elle lui a envoyé une charte de bonne conduite comme : « Aller à des expositions ensemble » ou « Coucher les enfants plus tôt… ». Bref, deux pages de “ il faut “ et “on va”.

Rien de magique, rien d’innovant !

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Elle a organisé leur anniversaire tombant le même mois. J’y étais invitée avec mon mari et mes enfants. Plutôt mourir que d’y aller. Impossible de décliner l’invitation. Mon mari ne l’aurait pas compris. J’y suis allée. Je revois son regard à elle me scanner des pieds à la tête pour vérifier ma tenue et surtout la silhouette plus fine que la sienne. Et alors ? Mais elle ne savait rien à ce moment-là.

Jusqu’au jour, où elle lui a imposé un week-end de discussions. Rendez-vous à quelques dizaines de kilomètres dans un hôtel, un château suranné. Leurs enfants étaient gardés par des amis. Elle l’a mis à la question au cours d’une nuit d’insomnies ponctuée par ses pleurs. Il lui a avoué pour moi. Elle l’a menacé de le dire à mon mari. Mais elle l’avait mieux cerné que moi, mon mari. Elle pensait qu’il allait venir les tuer, s’il l’apprenait. Elle a décidé d’adopter une autre stratégie.

Elle a engagé un détective et, soit par l’intermédiaire de cette personne exerçant un métier inavouable soit par un logiciel, elle disposait de nos échanges virtuels par texto. Elle lui ressortait le lendemain des expressions lues dans mes sms. Et ça je trouve ignoble, malhonnête, malsain. Elle savait que nous étions ensemble, qu’importe la teneur de nos échanges ?

« Le compte avait commencé
A rebours
Était-ce vertige déveine ?
Qui sait ?
Un voyage un aller seul
Au long court
D’où l’on ne revient jamais »
Sorry Angel », Serge Gainsbourg)

Nous nous retrouvions dans des bars pour partager une heure ensemble chaque jour entre le bureau et le retour dans nos foyers. Je n’avais plus aucune relation avec mon mari. Mon amoureux en avait plus avec la mère de ses enfants, mais avec aigreur. Elle voulait se séparer. Elle nous suivait ou nous faisait suivre. Je me savais traquée. Il n’y avait que les footings qui me rassuraient sur les capacités du détective à me suivre.

Avait-elle engagé un runner ? Sûrement pas !

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Après qu’elle lui a imposé maints ultimatums pour qu’il se décide, elle a pris la décision de se séparer. Elle échafaudait de façon très expert-comptable les plans de l’avenir de leur famille. La date de l’annonce aux enfants, le lieu de résidence des enfants, l’entente obligatoire entre eux, la façon dont il devait cuisiner pour les enfants, les vacances… tout était programmé.

De mon côté…

« Moi j’aurai tout essayé
Mon amour
C’était vraiment pas la peine
Je sais
Que c’était foutu d’avance
Mon amour
Je n’ai ni remord ni regret »
Sorry Angel », Serge Gainsbourg)

De mon côté, je menais une double existence qui ne pouvait pas durer. Je voulais me séparer de mon mari. Ma décision avait été prise avant, inconsciemment depuis sans doute longtemps. Plus ou moins consciemment depuis ce fameux coup de pied dans le dos de mon fils, le coup de trop. Mes plans n’étaient pas aussi clairs que ceux de la compagne de mon cher et tendre.

Malheureuse… toujours planifier, anticiper, prévoir.

Un jour de congés dans la famille de mon mari, celui-ci un matin au lit a voulu des relations avec moi. Nu dans le lit. J’étais mise au pied du mur. Que faire ? Faire comme si de rien n’était ? Et donc simuler ? Ou (me) refuser ? Je lui ai dit non, simplement non. C’est fou comme ce petit mot peut faire dégringoler un édifice de routines, d’habitudes, de non-dits, d’acquis, de certitudes….

Non. Impossible.

Et là tout ce qu’il ressassait depuis des mois, et moi tout ce que je cachais depuis si longtemps est sorti. Ses questionnements « Tu ne veux plus ? », « Tu as quelqu’un ? », « Tu passes ton temps sur ton portable ». Mes réponses. Mes reproches. « Ce n’est pas le problème. Je te parle de nous. Je n’aime pas la façon dont tu réagis avec notre aîné. »

Je ne suis pas malheureuse avec toi, mais je ne suis pas heureuse non plus.

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Ce que je n’aimais pas chez lui, attendre que tout vienne de moi, en être épuisée au point que je manque de leadership dans mon travail car je dois me reposer de mon rôle de chef d’orchestre à la maison. Je n’aime pas prendre tout le temps des décisions. Et je lui reprochais surtout son incapacité à assumer son rôle de père avec un enfant précoce et très difficile à élever.

Chez lui ce fut spectaculaire. Il s’est levé et est allé faire un tour, comme il le fait à chaque fois quand il est très énervé. Dans cet endroit dominé par une nature généreuse en bord de mer, le paysage procure un véritable festival des sens. Mais la tempête dans son esprit devait le couper de ces paysages si vivants et vibrants de couleurs et du bruit de la mer. Seule dans ce lit, je me demandais ce qu’il pouvait faire : sortir dans l’immense propriété ou aller se confier auprès de l’un des membres de sa famille, passant des vacances comme nous dans cette grande maison familiale.

Aux hurlements que j’ai cru entendre déchirer le silence, j’ai compris qu’il était sorti. Je n’étais pas sûre. Je faisais semblant de croire que ces cris de rage pouvaient aussi être le vent dans les arbres, au mois de mai ? Je me raccrochais à des pensées chimériques. Il fallait ensuite se heurter aux autres. Faire semblant devant les enfants et la famille.

C’était le jour de notre départ. Un long voyage en train allongé par son attitude inqualifiable. Assis en face de moi il me dévisageait. Lorsque je levais les yeux sur lui, j’évitais ses expressions qui se faisaient tantôt hargneuses tantôt implorantes. Il avait fait en sorte d’éloigner les enfants en les asseyant l’un à côté de l’autre.

Et il m’interrogeait du regard sans rien dire. Il était encore plus pitoyable.

Je ne voulais pas lui faire de mal. Je ne pouvais rien faire. Je voulais écrire à mon amoureux. Je n’avais pas l’indécence de tenter. Il ne me lâchait pas des yeux. On rentrait dans le dur.

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Pour combien de temps ?

« Sorry angel
Sorry so
Sorry angel
Sorry so »
Sorry Angel », Serge Gainsbourg)

 

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