Mais qui s’occupera des enfants ?

« J’ai tout ce qu’il me faut ici avec moi : j’ai de l’air dans les poumons et quelques feuilles blanches pour travailler. J’adore me réveiller le matin sans savoir ce qu’il va m’arriver, qui je vais rencontrer, où je vais échouer. Il y a quelques jours, j’ai dormi sous un pont ; et aujourd’hui je suis ici, sur le plus grand navire du monde, à boire du champagne en de si bonne compagnie. Je pense que la vie est un don et je ne veux pas la gâcher, on ne sait pas quelle donne on aura le jour suivant. On apprend à accepter la vie comme elle vient pour que chaque jour compte. » (Film « Titanic », Jack)

La panique à bord. Le Titanic a commencé à couler.

La panique des parents.

Le confinement ? Mais qui s’occupera de nos enfants ?

« Le télétravail oblige, nous ne pouvons pas leur consacrer de temps ni d’énergie. En parents responsables de famille, il faut continuer à gagner de l’argent… » L’argent. L’argent. Ce mot résonne dans ma tête. Depuis que je n’ai plus de chômage, plusieurs personnes m’ont demandé comment je faisais… Eh bien, j’ai travaillé pendant des années et fait des économies. Et mon mari travaille, donc ça va pour le moment, tant que les enfants sont encore petits.

Qui va s’occuper des enfants ?

Ces pères en chômage partiel qui n’imaginent pas comment vont-ils occuper leur progéniture. C’est la première fois que cela leur arrive. Ils se sentent tellement perdus… Et ceux autres qui appellent à la rescousse les grands-parents des petits.

Sérieux, ça existe ?

Eh oui, messieurs, mesdames, ça existe. Pendant que vous faites des efforts pour rester chez vous avec vos deux, trois, quatre enfants voire plus. Alors que vous limitez vos contacts avec le monde extérieur, certains continuent à confier leurs enfants aux grands-parents. Et je ne parle pas du personnel soignant. Non. Je parle de cadres qui n’ont aucun risque de perdre leur travail, qui ont des économies, et qui continuent à dire que ce n’est pas grand-chose tout cela, que cela va vite passer. Et ils prennent donc des risques pour les autres…

Moi aussi je me demande comment nous traverserons cette période. Non que je n’aie pas l’habitude de passer du temps avec mes enfants, bien au contraire. Après deux mois de grève où le cadet s’est retrouvé avec moi parfois quatre jours par semaine car sa maîtresse fait partie des grévistes actifs. Après l’hospitalisation de mon fils aîné en décembre et la période de convalescence. J’ai l’habitude même si je sais que ce sera compliqué à cause du tempérament fort de notre « zèbre » et l’énergie débordante de nos deux garçons. Certes nous avons une grande terrasse mais c’est tellement insuffisant par rapport aux activités et sorties auxquelles ils sont habitués.

Alors je raye du calendrier, la main lourde, mes heures de conduites, les sorties de classe avec le cadet, mes démarches pour obtenir la nationalité française, les rendez-vous chez des spécialistes pour les enfants et moi. Je raye toutes les activités extra-scolaires auxquelles je l’ai accompagne. Je raye la colonie de printemps de notre fils aîné et sa classe découverte. Je raye les activités relatives au développement de mon blog et de mon activité de coach de vie. Même Vinted est en pause des commandes et des livraisons et j’étais lancé dans un grand tri de vêtements depuis quelques semaines. Un petit revenu supplémentaire.

Eh oui. Une maman au foyer a un agenda digne d’un ministre. La preuve…

Mais ce n’est pas grave tout cela, les rendez-vous annulés et le permis de conduire qui devra attendre. En revanche je m’inquiète pour la santé de mes deux parents qui sont tous les deux atteint de comorbidité. Pour le moment dans mon pays natal, où ils vivent, il y a peu de cas de malades et très peu de décès, mais alors la discipline y est bien plus forte qu’en France. Ils ont été confinés bien avant nous, après le premier décès. Ils ont fermé les écoles quelques jours avant nous.

Le mari de mon amie d’enfance est enfin rentré de Bristol, il y a deux jours, après quarante heures passé dans un car de ligne régulière. Suite à l’annulation de son vol, il a dû trouver une solution pour lui et ses quinze élèves sourds-muets. Depuis son retour, l’interdiction de s’approcher de ses beaux-parents. Et par la même de sa propre fille, puisqu’ils habitent tous ensemble. Ne surtout pas mettre en danger la santé des parents de mon amie. Elle prendra donc tout en charge, en plus de son travail à distance, le temps de la quarantaine de son mari.

Les maîtres mots : prudence et responsabilité.

Alors aujourd’hui je rends hommage à toutes les mamans qui, comme moi, ont choisi de consacrer du temps et de l’attention à leurs enfants, non seulement en cette période de confinement. Elles n’ont pas eu besoin de Coronavirus pour comprendre ce qui comptait réellement. Pas besoin de confinement pour aller à l’essentiel.

Je comprends bien sûr qu’il faut gagner de l’argent pour payer les factures et les crédits. Je sais aussi qu’il y a des métiers où justement à cette période de crise il faut travailler sans relâche pour soutenir le système de santé. Il y a des situations où, bien évidemment, les deux parents sont réquisitionnés car leur travail peut contribuer à sauver des vies ou nourrir la population… Les médecins et infirmières. Les boulangers. Les assistantes sociales et les professeurs des écoles pour assurer le service minimum aux enfants du personnel soignant.

Les métiers essentiels. Indispensables au fonctionnement de notre société. À la survie de notre espèce.

Lorsque je travaillais encore dans une entreprise, je ne me suis jamais sentie indispensable ni essentielle à travers mon métier. Et quand je vois ces personnes qui ont l’un de ces métiers non essentiels et qui, à l’annonce du confinement, ont envoyé leurs enfants en province chez mamie et papi qui ont une pathologie ou une maladie chronique, je me dis que nous vivons dans deux mondes parallèles.

Nous n’avons pas les mêmes valeurs, ça c’est sûr !

Quand j’observe ces êtres persuadés que sans eux la terre s’arrêtera de tourner parce qu’ils vont passer du temps avec leurs enfants et leur conjoint au « détriment » de leur travail, je me demande à quoi bon avoir les enfants. Ces pauvres enfants qui même en temps de crise n’ont pas beaucoup de valeur aux yeux de leurs propres parents. En tout cas une valeur bien moindre que les billets d’euros dans leur portefeuille et les sommes cumulées sur leur compte bancaire.

Alors je ne compatis pas à ses parents qui doivent renoncer à leur travail pour s’occuper de leurs enfants. Mais je compatis à ses mamans qui ont l’habitude de s’occuper de leurs enfants jour après jour pendant des années et qui, en cette période de confinement, devront encore le faire heure après heure, minute après minute, sans droit à quelques moments de solitude ni de répit. Celles qui n’ont jamais été aidée par qui que ce soit, car la famille est trop loin ou inexistante. Sans aucune reconnaissance pour le travail qu’elles font sans relâche.  

À toutes ces mamans je dis « bravo » ! Vous êtes les héroïnes des temps modernes.

Aux mamans qui ont des années d’études supérieures, qui parlent plusieurs langues, qui ont des talents extraordinaires dans des domaines artistiques, qui sont ingénieurs de formation, qui ont travaillé sur des postes à responsabilités. Et qui ont décidé, un jour, de choisir l’essentiel. Elles ont choisi le métier le plus essentiel et le plus utile au monde : s’occuper de ses enfants. Non pour l’argent ni la gloire, mais pour l’épanouissement et le bonheur de la génération à venir.

Le métier essentiel. Indispensable au fonctionnement de notre société. À la survie de notre espèce. Le seul qui peut sauver le Titanic qui coule.

Belfast, Northern Ireland – Titanic Museum Belfast

Bravo mesdames, vous portez cet univers sur vos épaules ! J’espère que vos conjoints se rendront enfin compte de la magnifique mission que vous remplissez. Je sais que vous êtes nombreuses à penser que votre bonheur et celui de vos enfants n’est pas complet face à la société capitaliste qui nous pousse à pédaler dans le vide au nom d’une course effrénée à la productivité. Quoi qu’il en coûte…

La cellule familiale.

L’écologie.

La santé.

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Restons à la maison et protégeons les personnes vulnérables, âgées et malades.