Tout pour être heureuse… 2e partie

Je vais avoir 40 ans. Je suis seule. Pas d’amis, pas de famille, pas d’enfants.

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J’ai 40 ans et je prends conscience que je ne suis qu’une illusion de moi-même…

[Témoignage]

Septembre

Je me suis mariée par amour. Je me suis mariée, moi qui n’ai jamais trop voulu me marier, moi qui ne voulais le faire que si on me le demandait. Je me suis mariée alors qu’il n’en avait pas spécialement envie, qu’il n’a même pas émis l’idée, mais je l’ai fait car je l’aimais.

J’ai eu des enfants, non pas parce qu’il voulait un enfant de moi. Mais parce que ces petits êtres merveilleux se sont logés dans mon corps sans que nous les ayons souhaités. J’ai été mère au foyer alors que je voulais travailler, je voulais mon indépendance. Je ne regrette rien, tous ces choix je les ai faits par amour. Parce que j’aimais mon mari avec passion et dévotion. Parce que j’aime mes enfants avec un amour indestructible. Mais là, j’ai quarante ans et je n’ai plus rien. Absolument plus rien. Mon mari a déjà une nouvelle petite amie. Alors que la semaine avant il me suppliait encore de revenir…

J’entame ma descente aux enfers. J’ai du mal à être pleinement avec les enfants, je suis une machine école-douche-repas-dodo. Petit à petit, je me rends compte que je n’ai fait que masquer. Le psychologue que je vois depuis que je suis partie fait un travail remarquable. Sans me brusquer, lentement, les couches de carapaces s’enlèvent.

Jusqu’à ce jour de mes 40 ans. Comme si ces bougies que je souffle seule, ce champagne que bois, seule, faisaient voler en éclat le peu d’armure que j’avais encore.

Je pleure. Je pleure jour et nuit. Je ne dors toujours pas. J’appelle mon psychologue.

On se voit. Je fais les cent pas, impossible de m’asseoir. Je m’effondre. Recroquevillée comme une enfant dans un coin de son bureau, il me regarde et tente de m’apaiser. Peu à peu, je me calme, nous discutons.

« Vous acceptez de m’entendre ? »

Je me souviendrais toute ma vie de cette question. Car c’est là que j’ai entendu et accepté d’admettre ce qui m’arrivait. J’ai fait un burn-out affectif et maternel. Il avait déjà évoqué ce sujet avant, mais je refusais de l’entendre, c’était :

N’importe quoi ! c’est un phénomène de mode ce truc !

Non. Ça ne l’est pas.

Nous mettons en place une thérapie par l’écriture. Je dois écrire et surtout écrire à mon mari. Car je dois lui expliquer, maintenant que je commence à comprendre. Et cela nous permettra d’avancer. Alors j’écris, des pages, des tonnes de pages. Mais je déchire. Jusqu’au jour où le psychologue me dit que je dois les donner à mon mari. Que c’est important pour lui et moi, pour passer à autre chose.

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Octobre

Je le fais. Je passe le cap. Ça empire. J’ai des idées suicidaires. Je me revois seule chez moi, devant mon assiette un midi à regarder ce pauvre couteau à bout rond en me demandant si ça suffirait pour se tailler les veines, si ça ferait mal et combien de temps je mettrais à mourir.

Combien de temps on mettrait à me trouver…

C’est comme ça plusieurs semaines. Chaque objet est envisagé comme potentiel outil pouvant me permettre de mettre fin à mes jours. Je n’appelle personne et personne ne m’appelle. J’ai réussi à faire en sorte que les gens croient que je vais bien, que je n’ai pas besoin d’eux. Je sombre. Je me refuse à prendre tout médicament. J’ai peur, peur de ne pas savoir résister à l’envie d’en prendre trop, à devenir accro…

Puis un matin, je n’en peux plus, je vais voir mon médecin. Il me donne un traitement léger, je minimise mes angoisses, mes larmes… Je donne le change. Et je me décide à prendre le traitement. Une semaine. Je dors. Je recommence à manger un peu. Les enfants sont revenus, ça me donne l’énergie nécessaire. Mes huit kilos en moins se voient affreusement. Mais ils ne disent rien. Ils m’entrainent juste vers la vie.

Merci à mes enfants. Ils ne le savent pas, mais ils ont été ce qui m’a ramenée
à la vie.

Je reprends doucement le contrôle. Je pleure toujours, mais moins. Je dors un peu. Je mange. Je sens que je dois reprendre les choses en main. Alors nous mettons des objectifs en place avec mon psychologue. Petit à petit, semaine après semaine, je me recentre sur moi. Je dois apprendre à savoir qui je suis devenue, ce que je veux et ce que je ne veux plus. Je passe encore par des heures compliquées, mais c’est salvateur. Des techniques de relaxation m’aident à me canaliser.

Je dois me retrouver, ce sera long, mais j’y parviendrai. Je dois guérir de cette pression sociétale que je me suis mise. Je dois admettre que j’ai des failles, je dois accepter que je ne puisse pas être parfaite. Je dois dire que j’ai besoin d’aide, je dois apprendre à écouter mon cœur, mes envies et mon corps. Je dois savoir lâcher prise et vivre l’instant présent.

Je dois me retrouver en tant que maman. Car même ça, je l’ai perdu de vue. Enfermée dans ma tête, prisonnière de mon silence et de ma solitude.

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Décembre

Je décide de déménager. Je décide de vivre. De sortir. Alors un à un, je mets en place. Je rappelle les amis, je m’excuse. Certains m’écoutent avec bienveillance. Certains ne m’écoutent pas. Ce n’est pas grave, je comprends. Je commence à sortir : bowling, cinéma. J’ose aller boire un café, seule, en terrasse. Je me remets à lire. J’échange avec des inconnus. Le chemin est encore long, je sais que je suis fragile. Ma solitude me pèse souvent. J’ai parfois des grands moments de désespoir, mais je sais comment les appréhender.

Ma bouée, c’est d’écrire.

Je me retrouve peu à peu dans mon rôle de maman. Je crie moins, je suis plus disponible. J’ai encore du boulot, mais je m’approche de l’équilibre qui m’est nécessaire pour être pour eux celle dont ils ont besoin. De fait, eux aussi commencent à aller mieux. Certes, j’ai brisé une famille. Mais avec le recul, je crois que je nous ai rendu service.

Nous nous étions oubliés en tant qu’amants-amoureux.

Nous nous étions enfermés dans des rôles car il le fallait. Nous donnions le change, mais je crois que ni lui ni moi n’étions heureux. Alors pour les enfants, parfois je me dis que j’ai fait le mauvais choix. D’un autre côté, j’ai toujours eu cette conviction que nos enfants ne sont bien que si nous leur expliquons, si nous les rassurons et si nous-même nous sommes bien.

Aujourd’hui, mon ex-mari et moi-même essayons de leur montrer que même si nous avons deux toits différents, notre amour pour eux et notre volonté à les conduire sur une route qui les rendra heureux sont leur trésor et que ça, personne ne pourra le briser.

Je vais mieux. Je n’ai plus d’idées suicidaires, j’ai des projets. J’ai encore du mal à avancer certains jours, mais j’ai cette force en moi, cette idée folle que le meilleur est devant, que dans la vie rien n’est immuable, figé. Je veux avancer, trouver un emploi, retrouver l’amour, voir mes enfants grandir et s’épanouir, profiter des amis qui ne m’ont jamais laissé tomber.

Je veux sourire a des inconnu(e)s dans la rue, je veux découvrir le monde, je veux faire découvrir le monde a mes enfants, je veux juste profiter de ces instants de bonheur sans plus jamais m’imposer de correspondre à l’image de la femme parfaite imposée par des clichés et des préjugés.

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La femme/mère/épouse/amante parfaite, c’est chacune de nous avec nos imperfections et nos faiblesses. Aujourd’hui, je suis moi. Moi, pas encore bien définie, mais j’y travaille… »

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