Il y a quelque chose dans son regard… quatrième période

La dernière période dans l’entreprise est cauchemardesque. Après ce fameux trente-et-un décembre où j’ai décidé de puiser au plus profond de moi pour retrouver le bonheur au sein de mon foyer. Où j’ai décidé de renoncer à la passion qui ne me menait à rien…

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Pour sauver mon mariage, je ne ferai plus attention au collègue dont je m’étais éprise depuis le mois de septembre…

Nous sommes en janvier. Je me confie à plusieurs collègues femmes. Cela fait du bien de parler, de sortir de mon mutisme, de me sentir soutenue.

Les budgets pour cette nouvelle année ont été drastiquement coupés – le directeur qui m’avait embauchée six mois auparavant a quitté le bateau en décembre. Officiellement une démission. Officieusement un licenciement.

Et qui dit « pas de budget » dit « pas de projets ».

Nous sommes donc huit pour une charge de travail de deux. Toute l’équipe est sur la sellette. Difficile de ne plus faire attention à mon collègue sans être occupée, sans pouvoir me concentrer sur mon travail que j’arrive à faire en deux heures sur une journée de huit heures. Tous les éléments se sont réunis contre moi.

Je m’ennuie. Je tourne en rond. Cela devient une vraie torture. Je n’arrête pas de penser à lui. D’imaginer comment ce serait si je succombais à la tentation. Je le vois se déplacer, je sens l’odeur de son parfum. Et lui, en fonction de son humeur du jour, peut être très agréable et très charmant. Mais le lendemain c’est monsieur Hyde qui revient en force, et voyant que je lui résiste, plus aucune pitié à mon égard. Blagues de très mauvais goût. Remarques désobligeantes.

Dans l’absolu, je sais au fond de moi que ce n’est pas un péché de tomber amoureuse de quelqu’un, mais pas d’un gars comme lui !

Et lui a décidé de me tuer à petit feu. Sourire aux lèvres.

Je me sens extrêmement vulnérable. Je commence à somatiser. Insomnie. Coliques intestinales. Bouton de fièvre. Pas un bouton. Une irruption de plusieurs boutons de fièvre. Le médecin traitant m’arrête deux jours ! Il n’a rien compris… Je laisse tomber les médecins. Je m’en sortirai toute seule. Je me connais, j’en suis capable. Je tente de m’en convaincre. Je regarde dans le passé, les moments difficiles que j’ai pu surmonter, cela me redonne de l’espoir et un peu d’optimisme pour l’avenir…

Mais en réalité, je me sens comme un ange déchu. On m’a coupé les ailes définitivement, et j’ai très peur de ne pas pouvoir m’en sortir. Cela fait horriblement mal.

C’est à cette période que je commencerai à faire des achats compulsifs. En boutiques, mais surtout en ligne. Vêtements, jouets et livres pour les garçons. Fringues pour moi. J’ai honte de dire quelle somme j’étais capable de dépenser chaque mois… Parfois je ne déballais même pas ce que j’achetais. Une addiction.

Le soir, quand je rentre, je rêve de douche et tranquillité. La nounou qui garde mon grand après l’école, me raconte tous ses nombreux problèmes familiaux et personnels, parfois pendant une heure. Elle a trouvé une oreille attentive et s’est habituée à ma bienveillance. Mais elle me pompe le peu d’énergie qu’il me reste. Certains soirs j’irai trainer aux magasins pour ne pas devoir l’affronter. Je n’ai pas le courage de lui dire juste de partir. Elle s’occupe bien de mon enfant, il s’est attaché à elle, un substitut de grand-mère, et elle lui parle ma langue maternelle…

Mais je n’ai plus de forces mentales pour l’épauler.
J’ai tellement besoin qu’on m’épaule…

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Mon mari ne voit rien. Il me reproche d’acheter trop de fringues de marques pour les enfants et pour moi. Ma réaction ? « Va te faire foutre, c’est mon argent. Arrête de fouiller dans mes comptes bancaires ». Je lui ai dit, et répété, que l’ambiance au travail laissait à désirer, mais sans entrer dans les détails. Que lui dire ? Comment lui expliquer ? Que j’ai failli le tromper avec un collègue ? Non, impossible de le lui faire endurer. Cela lui ferait trop de mal et ne résoudrait en rien mes problèmes.

J’ai donc décidé de ne rien dire, de le protéger car je l’aimais encore, malgré tout

Et si je ne l’ai pas trompé, c’est que je savais pertinemment que ça allait me tuer intérieurement car j’étais vraiment attachée à cet homme, mais lui ne partageait pas cet état d’esprit avec moi. Et si j’avais couché avec lui, je me serais attachée encore plus et cela m’aurait achevée. C’est très rare qu’une femme ne s’attache pas à l’homme avec qui elle trompe son mari… les hommes ont plus de facilité à être infidèles et passer à autre chose. (OK, pas tous. Certains…)

Je les envie à vrai dire. Ce serait tellement plus simple.

OK, mon mari m’a dit une ou deux fois de donner ma démission. Mais il savait très bien que je ne le ferais pas. Nous avions besoin de deux salaires et si je démissionnais, je n’aurais pas de chômage… Il ne s’attarde pas sur mes problèmes. Je lui en voudrai énormément par la suite, sans le lui dire ouvertement. Cela s’ajoutera à la liste des problèmes non résolus dans notre couple et qui nous éloigneront de plus en plus. Une liste déjà bien longue.

Mais je suis une personne qui essaie d’aller toujours de l‘avant, même dans des situations extrêmement pénibles. Trouver une solution. Trouver une porte de sortie. Trouver une alternative… Et puisque je m’ennuie, et qu’on me répète sans cesse que je suis incompétente dans mon métier, j’ai une idée extraordinaire : je ferai une formation pour me remettre à niveau !

Youpi !

Cela me permettra de réviser pendant les heures de travail, et de ne plus m’ennuyer. De plus, ce sera bénéfique pour l’entreprise, de nouvelles compétences disponibles tout de suite.

Je fais une demande officielle auprès de RH, je peux financer ma formation, quinze mille euros, grâce à mes économies. Je souhaite juste être libre un vendredi sur deux pour me rendre à mes cours qui auront lieu un vendredi et un samedi sur deux… Ma demande est refusée sous prétexte que je n’ai pas asses d’ancienneté. Je suis dégoutée. J’ai envie de leur crier tout mon mal-être, toute la souffrance, toute la maltraitance que je subis. Je ne dis rien…

Mais à partir de ce moment, j’ai un plan. Je ferai la formation, dans cette entreprise ou à l’extérieure. Je ne fais plus aucun effort ni sur le plan des tâches qui me sont confiées ni sur le plan relationnel vis-à-vis de mon équipe et de mon chef. Plus rien. Le matin, lorsque je sens que je suis trop épuisée, et je me sens épuisée constamment, je ne me lève pas. J’envoie un sms pour dire que je suis malade.

Rien à foutre ! Ils vont voir.

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Mon entretien d’évaluation approche. Il aura lieu en mars. J’ai hâte d’y être. Je veux qu’on me vire. Et je fais tout pour. L’entretien se passe mieux que prévu, mon chef est complètement en phase avec moi : je ne me suis pas intégrée dans cette équipe, il vaut mieux que je parte. Je rencontrerai la RH le lendemain. Rupture conventionnelle ! Inespérée ! Non seulement je quitterai l’entreprise, mais en plus je pourrai faire ma formation en tant que demandeur d’emploi. Et avoir enfin du temps pour moi et les enfants.

Du temps pour moi. Pour ressusciter.

Il va falloir que je reboote mon cerveau. Sortir de ma tête toutes les idées que j’ai accumulées depuis plusieurs mois et me remettre sur les rails. Me projeter dans l’avenir. Non dans deux ou trois ans. Dans vingt ans. Dans trente ans. Se détacher du présent. Me projeter et m’y tenir.

Qui j’ai envie de voir dans le miroir quand tout cela sera derrière moi ?

Je vois une famille réunie et heureuse. A ce moment-là c’est difficilement imaginable, mais je le visualise dans ma tête. Je commence à croire que c’est encore possible. Je resterai dans l’entreprise pendant trois mois encore. J’ai accepté cette proposition car cela me convenait financièrement. Et eux ne voulaient pas se séparer de moi trop vite non plus, besoin de moi sur un appel d’offre important…

Grosse erreur. J’aurais dû partir immédiatement.

Mes deux collègues femmes ont terminé leur CDD. Je me retrouve seule… Une descente aux enfers malgré la perspective de quitter l’entreprise en juillet. Je suis en plein bore-out professionnel et en burn-out maternel. Rien ne va plus. Au travail j’écoute de la musique toute la journée, dans ma bulle. A la maison, je n’ai envie que de m’isoler. Même pas de dormir. Juste de m’isoler.

Mon organisme est déréglé. Le soir j’ai des douleurs dans la poitrine. Des difficultés à respirer. Je deviens hypocondriaque, persuadée de développer une maladie incurable ou d’avoir bientôt une crise cardiaque. Je n’en parle à personne. Je serre les dents et je compte : les jours, les semaines… Il m’arrive en plein réunion d’équipe de sortir rapidement pour aller pleurer à l’abri des regards.

Mais je jouerai le jeu jusqu’au bout.

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Pendant les dernières semaines, j’arriverai au bureau à dix heures et je le quitterai à dix-sept heures. Avec deux heures de pause à midi… Un fantôme. Mais quelques personnes bienveillantes m’entoureront jusqu’au bout, même si je ne leur ai pas dit le fond du problème. Je préfère rester discrète. A partir du moment où j’annonce que je partirai, je ressens un soutien de plusieurs collèges d’autres services avec qui je n’avais pas énormément d’échanges jusque-là : « Tu as raison », « T’en as assez supporté », « T’as attendu trop longtemps » « Ils ont été très durs avec toi »…

Une nouvelle collègue, une jeune femme belle et sûre d’elle, arrive un mois avant mon départ. Elle déjeuner avec l’équipe (sans moi). Elle s’énerve, elle se lève, elle part… Inacceptable pour elle l’ambiance à table avec des blagues sexistes et des discussions vulgaires entre mecs en sa présence.

Je n’étais donc pas parano !

Pourquoi n’ai-je pas fait ce qu’elle a osé faire ! M’imposer et dire « stop » ! Question de personnalité et d’éducation… Mais j’ai énormément de mal à accepter d’être comme je suis, de m’être tue pendant tout ce temps, de ne pas avoir su réagir comme elle… A qui la faute ?

Je suis dans le brouillard. Une profonde remise en question commence

 

 

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