« – Notre famille se désagrège et c’est tout ce que ça vous fait ?
– Ouais, ça me fait de l’air, tu peux pas savoir ! «
(film « Le premier jour du reste de ta vie »)

Ça y est. J’ai eu 40 ans en mai. Petit bilan.
Études : coché. Et ce n’est pas terminé.
Appartement : coché. Celui-ci ou un autre. Je n’éprouve aucune difficulté à m’imaginer ailleurs. D’ailleurs il m’arrive de plus en plus souvent de m’imaginer vivre ailleurs, je n’aime pas cet appart.
Mari : coché. En fait je réalise de plus en plus que c’est un bouton radio et non une case à cocher (les digitaux vont comprendre).
Je suis air. Mouvement. Liberté.
Il est terre. Sécurité. Solidité.
Enfants : coché. Deux garçons, deux extrêmes. Feu et eau.
Complémentaires. Je suis très fière d’eux. Un vrai bonheur à long terme. J’apprends à leur faire CONFIANCE. J’adore les voir devenir AUTONOMES. Je veux qu’ils soient des êtres humains LIBRES.
Santé : plutôt bien pour mes quarante ans, mais la condition physique améliorable, je suis quelqu’un de très exigeant avec les autres, mais aussi avec moi-même.
Amitié : plutôt la qualité que la quantité. Je n’ai ni le temps ni l’énergie ni l’envie pour multiplier des relations superficielles.
Boulot : en reconversion pro depuis deux ans. J’aime le changement. Je déteste la routine, car « Si l’aventure est dangereuse, la routine est mortelle. » (ça c’est de Paolo Coehlo).
Rêves : si le point précédent marche, certains rêves auront de grandes chances de se réaliser.

Relations avec la belle-famille : quasiment inexistantes depuis notre grosse crise de couple. Cela m’arrange. Finis les repas familiaux à mourir d’ennui, avec toujours les mêmes discussions superficielles et fades depuis des années. Finies les comparaisons entre mes enfants et leurs cousins qui ont le même âge, ces jugements sur mes enfants par des gens qui ne les connaissent pratiquement pas. Celui-ci est hyperactif et l’autre est sauvage. C’est extrêmement réducteur. Feu et eau…
Et selon les mêmes personnes, moi j’ai mauvais caractère. Facile de confondre tempérament fort et intégrité avec mauvais caractère. Simpliste.
Air.
Le reste ? Aucune importance. Sauf un point : la liberté. Ma valeur fondamentale et suprême.
Ma liberté de :
Choisir mes études et mon métier.
L’endroit où je vis et la manière d’éduquer mes enfants.
Décider de mes rêves et de la manière de les réaliser.
Être authentique, être moi-même.
C’est le plus grand acquis de mes 40 ans de vie. Un cadeau que j’ai décidé de m’offrir.
En quittant mon pays il y a seize ans, j’aspirais à cette liberté. Je ne l’ai véritablement acquise que grâce à MA CRISE DE LA QUARANTAINE. Et je le souhaite à chacune d’entre vous. Ne plus vous laisser dicter par les autres comment vous devez vivre. Ne plus devoir renoncer à vos rêves les plus profonds. Vivre la vie que vous voulez vivre et non une vie que les autres ont choisie pour vous.

Ma famille d’origine ?
Mon père voulait venir me rendre visite, sa fille cadette allait avoir quarante ans. Une super occasion pour enfin venir me rendre visite, NOUS rendre visite. Puisque pour une fois j’ai décidé de ne pas y aller moi et de ne pas organiser une grande réception familiale pour le fêter dans mon pays natal. Depuis des années je n’arrêtais pas d’organiser des réceptions pour réunir toute la famille : notre mariage, les baptêmes des enfants, leurs anniversaires, les 65 ans de ma maman, etc.
Cela fait cinq ans qu’ils ne sont pas revenus chez moi, même pas pour voir ce nouvel appart. Toujours les mêmes excuses, travail pour mon père, santé pour ma mère. Les parents de mes copines ont les mêmes contraintes et cela ne les empêche pas de venir voir leurs petits enfants ou les accueillir chez eux pour les vacances. Passons, j’ai fait mon deuil de leur rôle de grands-parents et de cette relation inexistante entre eux et mes deux garçons, et ma priorité maintenant sont mes enfants (et non mes parents).
Mon père avait donc l’intention de venir en France pour mes 40 ans. J’ai dit non. J’ai CHOISI de passer ces quelques jours JUSTE avec mon mari et mes enfants.
Une semaine avant mon anniversaire, il se retrouve à l’hôpital.

« Tu ne vas pas voir ton père ? »
J’y suis allée deux mois auparavant avec mon fils cadet. Que puis-je pour lui, je ne suis pas médecin ? Je l’appelle, c’est déjà bien, il peut s’estimer heureux car il m’a bien rendue malheureuse.
Donneur de leçons, moralisateur, faiseur de remontrances, plaçant au premier plan sa propre conception de la vie. Non seulement quand j’étais enfant, mais de plus en plus avec le temps qui passait…
Pourquoi alors continuer à le laisser abimer ma santé mentale ? Car oui ne pas assumer son rôle de grand-père, me juger sans absolument savoir qui je suis (devenue), me priver de mon statut d’adulte en me répétant sans cesse qu’il sait mieux que moi car il est mon père et plus âgé, me priver de mon droit à ma liberté de penser et d’agir en critiquant mes choix de vie (ma démission) et ma manière d’éduquer mes enfants, m’écrire des lettres et des cartes de vœux à toute occasion pour me rappeler que je vais brûler en enfer car je ne vais pas dimanche à la messe (oui vous avez bien lu), car mes enfants ne parlent pas bien sa langue (une énorme faute dans mon parcours qu’il n’arrête pas de pointer du doigt), car je ne « honore » pas mes parents comme il me l’a « appris »… Tout cela c’est abîmer ma santé mentale.
Une cellule familiale qui entrave la liberté de ses membres est une cellule cancéreuse.
Il a oublié depuis bien trop longtemps que les avions volaient dans les deux sens. Et c’est toujours moi la fautive, c’est moi qui ai quitté mon pays natal, c’est moi qui suis jeune et en bonne santé pour prendre l’avion facilement (avec deux enfants en bas âge). Parce que dans la « Bible » il est dit que… Et lorsque j’y allais, pas de ravissement, pas de temps, pas d’énergie pour ces petits en manque d’attention de sa part.
A quoi bon ? Dites-moi ?
« Soit parfaite et fais plaisir aux autres ». Et même si tu réponds à cette exigence permanente venant de l’extérieur, on va bien trouver ce qui cloche et ce qu’on peut te reprocher. Plein de raisons pour lesquels je sentais que je n’étais pas libre de décider de ma vie ni de prendre des décisions sans qu’il m’interroge sur le « quoi, quand, comment et pourquoi » et qu’il remette ensuite en question toutes mes décisions et tous mes choix, soit en ricanant « c’est une blague ? », soit en me menaçant « tu verras ! »… À QUEL TITRE ?
Air.

Alors à l’annonce de son hospitalisation ? A l’aube de mes 40 ans ?
« Tabula rasa ».
Je repars de zéro. Mon anniversaire des quarante ans, nous le passerons dans un endroit très familial. Où il y a de « vraies familles » comme a l’habitude de le dire mon fils aîné. Une vraie famille pour lui désigne « parents, enfants et grands-parents ». Certains ont des difficultés à se déplacer. D’autres prennent des médicaments. Mais ils sont là et se démènent pour leurs petits-enfants. Ils profitent d’eux et cela leur fait vraiment plaisir. Malgré leurs problèmes de santé et tous les autres soucis. Comme ma grand-mère a fait avec moi.
Aujourd’hui j’ai quarante ans et je suis (enfin) adulte. Maintenant je veux vivre ma vie rêvée et non la vie que les autres ont imaginé pour moi.
Voici les vœux d’une amie fidèle et sincère qui m’ont fait énormément plaisir. Des vœux non superficiels et qui prennent en compte qui je suis vraiment.
« Chère J…
Je te souhaite un très bel anniversaire. Oui le temps n’est pas au rendez-vous, mais à toi de faire briller ce soleil comme tu le fais chez tes ami(e)s. Je te souhaite aussi pour cette occasion marquante de souffler quarante bougies une pleine réussite de tes projets professionnels. Moi je crois en toi et t’invite à garder en tête que les conseillers ne sont pas les payeurs. On a déjà suffisamment de limites internes pour que nos proches nous en remettent d’autres que celles déjà imposées par le passé et qu’on les subisse encore un coup. Donc crois en toi et surtout pense au gain inestimable, la liberté qui rime avec responsabilité, à toi de fixer ton temps de travail, tes horaires c’est tellement précieux entre autres bénéfices que tu vas obtenir grâce à cette réussite. Bon anniversaire J… Je t’embrasse.«
J’aurais adoré recevoir ce type de vœux de la part de celui qui est censé bien me connaître et m’aimer vraiment, avec respect et bienveillance.
Le plus beau cadeau qu’un parent puisse offrir à ses enfants c’est de leur apprendre l’autonomie et de leur faire confiance une fois adultes.

Aujourd’hui j’ai quarante ans et ce qui m’importe, c’est que mes enfants soient fiers de leur maman.
Mes enfants, mon feu et mon eau.
Et leur papa, une terre d’atterrissage.
Je suis dans mon élément, ma famille nucléaire, mon espace de liberté.
Na zdrowie !