Souriez, vous êtes jugée !

« Certains aiment la facilité
Alors que d’autres aiment mener une vie dure
Mais personne ne doit aimer cette vie
De la même façon que toi »

(« Do what you do », Pink)

Je repense aujourd’hui à cette conversation que j’ai récemment eue avec une femme rencontrée au parc. Nous étions témoins d’une situation plutôt classique : une maman de quatre enfants, visiblement fatiguée et pressée de rentrer à la maison, a demandé gentiment pour la énième fois à son fils cadet de ne pas grimper sur un arbre. L’enfant n’écoutait pas et faisait ce qu’il voulait. Sa mère s’est énervée et a fini par lui crier dessus. Suite à cela ma voisine de banc a fait une remarque désagréable à cette femme et une dispute a éclaté…

[Histoire de lectrice]

Quelques minutes plus tard, une fois les émotions calmées et la mère avec ses quatre enfants partis, ma voisine de banc m’a lancé : « Avez-vous vu ça ? Ce n’est pas possible ! Je déteste ces bonnes femmes qui n’arrêtent pas de crier sur leurs enfants ! » Sur quoi je lui ai répondu : « Madame, cette femme a crié un peu trop fort sur son fils pour qu’il lui obéisse. Parfois, malheureusement, il est difficile de réagir autrement, surtout quand on est fatiguée. Je la comprends cette maman. Cela ne vous arrive jamais de hausser le ton à la maison ?  Combien d’enfants avez-vous ? »

« Euh, je n’en ai pas, je garde mon neveu de 8 ans une fois par semaine pendant quatre heures » m’a-t-elle répondu. « Ah, quatre heures par semaine… Peut- être c’est trop peu pour vous donner un aperçu de la charge de travail d’une maman qui passe sept jours sur sept avec ses enfants ? Faire le ménage, la cuisine et probablement aider ses enfants à faire leurs devoirs, c’est beaucoup pour une seule personne. Les nerfs peuvent lâcher ». Ma voisine de banc s’est tue. Elle n’avait plus envie de continuer cette conversation, moi non plus d’ailleurs. Peu de temps après nous nous sommes dit « au revoir » et elle est partie avec son neveu.

Cet épisode m’a fait penser aux situations dans lesquelles il m’arrivait de juger quelqu’un même sans le connaître ou dans lesquelles les autres me jugeaient verbalement ou juste avec un regard noir. C’est tellement facile de porter un jugement sur autrui et nous le faisons constamment. Et cela commence dès la naissance. Les gens jugent notre capacité à apprendre, notre poids, notre taille, l’âge auquel nous commençons à marcher et à parler, le bulletin scolaire, nos amitiés et nos partenaires, on juge les livres, les lieux, la nourriture, la météo, absolument tout. Cela fait partie de notre quotidien et j’ai l’impression que la plupart du temps se sont des jugements négatifs, des critiques non constructives.

Je me souviens de toutes les fois où je me suis retrouvée avec des copines pour prendre un café ou pour déjeuner, et forcément à un moment où un autre quelqu’un de nous a comméré sur untel. Nous avons jugé la façon dont une voisine élevait ses enfants, fait des remarques sur la manière dont s’habillait la directrice de l’école de ma fille ou les habitudes alimentaires d’une autre copine. Des sujets très futiles et en apparence anodins, mais qui en réalité ont en disent long sur nous-mêmes, qui exprimons nos peurs, nos angoisses, et même notre lâcheté à travers tous ces jugements. Le fait de pointer les faiblesses de quelqu’un d’autre nous rassure. Juger l’autre c’est en fin de compte juger soi-même, c’est comme un miroir de notre propre comportement.

« Certaines personnes aiment l’été, quand c’est chaud
Certaines personnes aiment le froid de l’hiver
Certaines personnes disent ce qu’ils pensent quand ils en ont envie
Et d’autres personnes ne sont pas aussi franches
Peu importe ce que tu fais tu devrais le faire
Tu devrais le faire tête haute »
(« Do what you do », Pink)

L’été dernier j’ai été invitée à un pique-nique dans un parc, dans une ville voisine, par des amies et leurs copines. Je suis allée en bus avec ma fille, âgée d’un an et demi à l’époque. Il faisait très chaud ce jour-là. Soudainement, j’ai entendu derrière mon dos quelqu’un parler de moi d’un ton plutôt méprisant et à voix basse : « Mais non, sérieux, il fait chaud à crever et la nana trimballe sa fille dans un bus blindé de monde alors que sa voiture reste garée devant son immeuble ! N’importe quoi ! » J’ai mis quelques temps à réaliser qu’il s’agissait de moi. J’ai été très surprise, pour ne pas dire choquée, qu’on parlait de moi de cette manière.

Je n’aime pas me justifier, mais ce genre de remarques m’énerve particulièrement. J’ai décidé de répondre à cette femme que : primo effectivement je suis venue en bus, mais il n’y avait pas de mal à ça et deuzio : que j’ai eu un accident de voiture il y a quelques années pour cela je ne conduisais plus. Et en quoi tout cela la regardait ? On ne se connaissait même pas ! Elle ne m’a pas répondu. Et heureusement. Je me suis rendue compte à quel point toutes ces critiques, tous ces jugements, ces comparaisons négatives et hâtives qu’on pouvait porter aux autres étaient inutiles, souvent blessants et n’apportaient absolument rien à personne. C’était juste une pure perte de temps et d’énergie.

J’ai réfléchi longuement à ce sujet et j’ai décidé de changer, de m’améliorer en tant que l’être humain. Pour cela je me livre à un petit exercice quotidien, certes assez difficile au début, mais tout à fait faisable si on le pratique avec assiduité. Tous les jours, j’essaie de ne porter aucun jugement sur rien et personne. Cela demande un contrôle constant de ses pensées et de sa parole. Ce qui n’est pas évident, c’est de s’abstenir de petits commentaires mentaux. Et surtout d’accepter la réalité telle qu’elle est. Même si on échoue plusieurs fois dans la journée, il faut persévérer. Avec le temps cette pratique deviendra une habitude. A long terme cet exercice est vraiment bénéfique et rapporte des résultats inattendus. Essayez-le !

« I say do what you do
Say what you say
Mean what you mean when you say
Cuz it’s your life, gotta make your own rules
And you gotta do it your way »
(« Do what you do », Pink)