Il y a quelque chose dans son regard… première période

Premier jour de mon nouveau travail. On me présente mon binôme.

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Un homme d’environ 45 ans. Visage impassible, regard glacial et perçant, je comprends en une seconde qu’il vaut mieux faire partie de ses amis que de ses ennemis. Mon intuition me trompe rarement.

Une tension inexplicable se crée entre nous deux dès le premier instant.

On me présente le reste de l’équipe. La RH m’avait dit que l’équipe était sympa. Je tombe des nues ! Sept mecs. Elle ne m’avait pas prévenue que je serais la seule femme dans ce service, le métier n’étant pas spécialement masculin. J’ai toujours travaillé dans des équipes mixtes, et je m’entends mieux avec les femmes. Je me dis que c’est une blague : « Où est ma vraie équipe ? »

Mais non, c’est confirmé. Je débarque dans cette équipe comme Blanche Neige débarquait dans la maison des sept nains. Personne ne l’avait invitée. OK, ils sont peut-être sympas avec elle car elle a beaucoup de qualités et surtout elle les distrait – elle est gentille, elle est souriante, elle leur raconte des histoires, elle leur fait à manger (et comme c’est un conte de fées pour les enfants, il ne se passe rien d’autre bien évidemment). Mais en réalité, elle ne leur sert à rien. Ils étaient tellement bien ensemble avant son arrivée, que maintenant ils cherchent par tous les moyens comment s’en débarrasser pour rester juste entre potes et que tout redevienne comme avant. Un pour tous, tous pour un. Il n’y a pas de place pour une nana. Donc, évidemment, quand la sorcière arrive, ils ne font rien pour protéger la jeune femme, pour l‘empêcher de manger la pomme empoisonnée. Bon débarras !

Il va falloir que je trouve une stratégie de survie dans ce milieu viril.

Je suis assise à côté de mon binôme. Nous travaillons ensemble, je rigole quand il raconte des blagues, c’est le roi des blagues, je participe aux after-works qu’il organise, je commence à apprécier ses qualités. Je fais des efforts. Les moments de complicité se multiplient. Derrière sa façade de bad-boy se cache un artiste… Il aurait voulu percer dans ce milieu, il n’a pas pu. Ses frustrations viennent certainement de là. Plus je le découvre, et plus j’arrive à déceler ses points faibles, ses blessures profondes… Un verre ensemble, un after-work, on discute, on s’apprivoise.

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Je l’apprivoise car c’est la meilleure stratégie pour me protéger. Exactement comme la Belle face à la Bête. Prisonnière dans son château, elle n’avait d’autre choix que devenir son amie. Je suis en train de vivre exactement la même chose. Pour ne pas trop subir la difficulté de la situation et le côté monsieur Hyde de cet homme, je développe une grande empathie à son égard. Même si je reste toujours sur mes gardes. Je sais qu’il ne faut pas lui marcher sur une patte sinon sa rage pourrait être incontrôlable, je l’ai déjà vu faire avec certains collaborateurs de l’entreprise. Bizarrement, on laisse couler. Il est vrai que c’est un bon professionnel, expérimenté et efficace.

Tout le monde lui pardonne son tempérament explosif. Avec les femmes il sait exercer son charme, c’est un excellent orateur, et quand il sourit c’est fatal. Il est parfaitement conscient de sa force de séduction et en use à bon escient. Quand il est dans son assiette, il anime les journées au bureau, il monopolise l’attention pendant les soirées. Avec les hommes, il sait s’y prendre également grâce à son extraordinaire sens de l’humour et son âme de leader. Personne ne lui résiste. Il a en lui une sorte de folie joyeuse (même si parfois un peu trop grossière à mon goût) qui ne laisse personne indifférent.

A cette période-là, je sors souvent le soir. Je me dis que je le fais pour bien m’intégrer dans l’équipe. Je l’explique ainsi à mon mari. Il est compréhensif. Il est vrai que hormis l’aspect relationnel, on me soumet à l’épreuve du feu également sur le plan de mes compétences professionnelles. Une seule femme face à tous ces hommes… Forcément je ne fais pas le poids, ce serait insupportable pour leur amour-propre, pour leur ego. J’ai toujours eu confiance en ma capacité à relever tous les défis, mais ils réussissent facilement à me déstabiliser. A force de me demander quelle est ma place parmi eux, je fais encore plus d’efforts pour leur prouver que je suis à la hauteur, sur les deux plans, professionnel et relationnel. Au bout de quelques temps, ils commencent à accepter et surtout à apprécier ma présence et font aussi de plus en plus d’efforts. Je commence à croire que ma place est bien là. Je suis enfin à l’aise en leur compagnie. On fait une photo d’équipe pour le journal interne, moi au milieu d’eux tous.

Sauf qu’avec mon côté fleur bleue, j’y mets trop d’énergie, trop d’enthousiasme, trop de moi.

A la maison, l’ambiance devient de plus en plus fade. Je rentre le soir à contre-cœur, les enfants me fatiguent de plus en plus, mon mari m’irrite. Le matin je me réveille le sourire aux lèvres, je n’oublie jamais de mettre mon parfum préféré, j’y cours presque, j’y vole. Au bureau on ne bosse pas, on délire. On profite de la superbe terrasse avec vue sur Paris, en multipliant les pauses café & cigarettes. Et on reste plus longtemps le soir.

Lui, il reste longtemps aussi. Il est en pleine procédure de divorce, mais n’a pas encore trouvé de logement. J’ai envie de le soutenir juste par ma présence bienveillante. Parfois, il met les écouteurs sur ses oreilles et ne dis rien toute la journée, plongé dans ses pensées, dans ses problèmes. J’arrive presque à entendre ce qui se passe dans sa tête.

♪ « Si j’entrais dans son âme, je saurais qui il est.
Je connaîtrais le drame qui le ronge en secret.
Comme nous, il a besoin de compter sur quelqu’un,
Je connais un moyen très doux pour séduire le loup. » ♪ (« Histoires », La Belle & La Bête, pour écouter la chanson entière, c’est par ici / Lien non sponsorisé)

Plus il va mal, plus je compatis, et plus je m’attache à lui. Je me sens comme une adolescente. Cela faisait des années que je n’avais pas été dans cet état. Je ne faisais plus vraiment attention aux hommes, je restais inaccessible, indifférente, en bonne épouse. Et j’étais surtout une maman, certes très fatiguée, mais épanouie. Une grossesse, une seconde… On devient mère et on oublie parfois d’être femme, même si l’on a un homme à nos côtés. Vous savez de quoi je parle.

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Mais un jour, il se passe quelque chose d’inattendu (pour ne pas dire magique). Un frôlement de main, un regard langoureux ou juste l’odeur d’un parfum suffisent pour mettre en alerte tous vos sens. Ce feu éteint ou amenuisé depuis si longtemps s’embrase.

Je baisse la garde. Je suis déboussolée. Je perds le nord. Je m’éprends de lui.

A suivre…

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